Au domaine agricole de ses parents dans le Jura, depuis toute petite, Mireille voit passer les voitures de rallye (Criterium Jurassien) et reste quelque peu subjuguée par la vitesse des bolides, sans pour autant en rêver pour elle-même. Mais lorsqu’elle commence le Karting vers 20 ans, la passion qui sommeillait en elle se réveille gentiment…
Avec un grand sourire, Mireille nous met tout de suite dans le bain : « J’aime la vitesse, j’aime rouler » et d’expliquer que l’histoire a commencé avec la pratique du karting : « J’ai rencontré des personnes en karting de location qui m’ont donné envie de m’initier à la compétition. C’est dans ce petit milieu que j’ai rencontré mon mari. Puis nous avons repris la gestion du garage à Vouvry et le temps a manqué pour continuer les courses. Mais mon mari, qui avait déjà fait du rallye, me parlait souvent d’essayer cet autre sport mécanique.»
Avec sa coéquipière et navigatrice Jeanne Rey.
La sensation de vitesse comme leitmotiv.
Alors Mireille se met au volant d’une Mitsubishi Lancer Evo9 et son ascension dans cette discipline se déroule plutôt vite et bien. .Son 1er challenge fut sa participation au championnat de France en 2022 et, en 2023 elle termine championne de France des rallyes féminins, au volant d’une Ford Fiesta Rally 3.
S’imposer dans un monde de garçons ne semble pas perturber Mireille : « J’ai baigné dans un monde assez masculin depuis ma naissance. Mes parents sont agriculteurs, j’étais proche de mon frère et c’est vrai que j’étais un peu garçon manqué… Le fait d’être une femme dans le monde du rallye ne m’a jamais dérangé, je n’y vois pas de barrières. »
Rallye de Corse.
Ambassadrice du sport automobile féminin.
D’ailleurs, le fait de devenir un peu ambassadrice de cette discipline de sport automobile pour permettre à des jeunes filles de s’identifier et d’oser se lancer est plutôt bienvenu pour la Vouvryenne, toutefois, elle trouve qu’il ne faudrait pas trop catégoriser les pilotes sur ce critère : « En rallye, on devrait continuer à rouler comme femme dans les mêmes catégories que les hommes. »
Il y a pas mal de débats à ce sujet actuellement. On veut promouvoir l’égalité mais ce serait peut-être mieux de juger seulement les performances du pilote, qu’importe son sexe.
Apparemment, ce serait une nouvelle tendance dans les compétitions. Les organisateurs proposent des rallyes roses avec des conditions d’inscription seulement pour les filles, impliquant, par exemple, un départ différé. La pilote Valaisanne trouve cela un peu dommage pour le côté challenge.
Une première Suisse en championnat du monde WRC.
La grande aventure est pour le 17 octobre : Mireille, dans sa Ford Fiesta Rally 3 en 4 roues motrices, et sa coéquipière Jeanne Rey prendront le départ du Rallye d’Europe centrale, 12e manche du Championnat du monde WRC. Avec un départ à Prague, elles rouleront. pendant 4 jours, sur des épreuves organisées en République tchèque, en Allemagne et en Autriche.
Inscrite pour un défi personnel.
Mais comment la pilote de 38 ans a-t-elle pu accéder à ce championnat ? «Les promoteurs du championnat du monde WRC ont mis en place un programme de féminisation visant à aider les pilotes féminines à évoluer dans le championnat du monde des rallyes. »
Des femmes ont été invitées à postuler pour faire partie des 15 retenues. Ces équipages étaient invités chez M-Sport en Pologne, qui leur offrait un atelier de 3 jours afin de sélectionner les 3 meilleures. Mais c’était réservé aux moins de 27 ans, donc je ne pouvais pas m’inscrire. Par contre, lorsque j’ai vu que les filles roulaient sur le même modèle de voiture que moi, j’ai pensé que c’était l’occasion de me lancer un défi personnel en me mesurant à ces pilotes sélectionnées. »
A Aleria en France, dans la poussière.
Une expérience, du plaisir et surtout, terminer le rallye.
Et c’est ainsi que Mireille et son équipe constituée de, comme elle relate avec sympathie, « ma naviguatrice, mon mari, mon témoin de mariage et un ami mécano…», part affronter une manche du championnat du monde WRC !
L’objectif de cette expérience est surtout le plaisir et pouvoir se tester face aux meilleurs du monde : « C’est clairement un challenge personnel. D’être la première femme suisse à se lancer dans le championnat du monde en WRC, c’est déjà une récompense. Si on est au départ après avoir passé tous les contrôles, ce sera un 2e cadeau, puis si pendant les 4 jours nous évitons les casses mécaniques et que nous sommes à l’arrivée, ce sera gagné pour moi !».
Futurs objectifs.
Que cela puisse lui ouvrir des portes ou pas, la pilote valaisanne aura déjà concrétisé un rêve. Quoi qu’il en soit, elle a très envie de continuer de rouler : « Je prends tout ce qu’il y a encore à prendre… Les organisateurs de rallyes suisses aimeraient évidemment que je courre sur le sol helvète. Je réfléchis aux possibilités futures…»
Texte : Julia Delattre
Photos : Archives de Mireille Vidueira Scheurer