La course d’orientation : encore trop méconnue du grand public, elle bénéficie pourtant d’un club très actif depuis 35 ans sur la Riviera. Le 17 novembre prochain, le CARE-VEVEY ORIENTATION organisera sa 100e course d’orientation populaire.
Pour cette occasion, une distance exceptionnelle de 15 km avec 100 postes à valider sera proposée.
Planète Sports rencontre Laurent Bischoff, membre du CARE-VEVEY ORIENTATION et orienteur.
Planète Sports (PS) : À plus de 40 ans, est-ce que vous n’êtes pas un peu âgé pour pratiquer la course d’orientation (CO)?
Laurent Bischoff (LB) : Je vous répondrai également par une boutade. Non, à 40 ans, j’ai enfin acquis assez d’expérience pour ne plus me perdre (rires). Avec les années, on développe une meilleure capacité à lire les cartes, on apprend de ses erreurs, on prend des décisions plus rapides sur les cheminements. C’est un sport qui fait autant appel à la tête qu’aux jambes, même si je n’ai plus mes jambes de 20 ans. Nous avons d’ailleurs dans notre club le champion suisse en catégorie plus de 85 ans, Henri Repond, qui a 92 ans.
PS: Ce sport est mal connu du grand public. On voit la CO comme un sport d’adolescents. Quelle est l’ampleur de ce sport à l’échelle suisse et internationale ?
LB: Pour les non-connaisseurs, la CO pourrait se résumer à un jeu de piste, à une chasse aux trésors ou à l’épreuve d’orientation dans Koh-Lanta. Mais ce n’est pas vraiment ça. La CO existe en tant que sport structuré depuis plus de 120 ans et est particulièrement bien implémentée en Suisse, surtout en Suisse alémanique. Nous avons un important réseau de clubs qui organisent des événements tout au long de l’année, au niveau régional, national ou international. Il y a une fédération internationale qui organise chaque année des championnats du monde. Et la Suisse est l’une des nations les plus performantes. Je peux citer comme exemple Simone Niggli-Luder qui a été 23 fois championne du monde. Une vraie légende de la CO. Ou encore Matthias Kyburz, cinq fois champion du monde de CO et qui termine le marathon olympique de Paris à la 30e place et 2e du dernier Morat-Fribourg. Des orienteurs qui courent vite !
PS: Par qui ce sport est-il pratiqué ?
LB: En Suisse, la course d’orientation est bien implantée, avec environ 8 400 membres affiliés à plus de 90 clubs à travers le pays. Ces clubs sont actifs et organisent chaque année environ 200 compétitions. Swiss Orienteering, l’organisation faîtière nationale, joue un rôle clé dans la promotion de la course d’orientation en Suisse, avec des initiatives qui s’étendent même jusqu’aux écoles. Les huit clubs romands accueillent et forment des membres de tous âges. Par contre, il n’est pas nécessaire d’être membre d’un club pour participer aux compétitions. Je vois lors des courses des familles, des amateurs, des gens qui veulent juste se promener avec une carte sans se perdre, en mode non compétitif.
PS: Pouvez-vous, en quelques mots, nous expliquer le principe et les règles d’une CO?
LB: La CO combine la navigation et la course à pied. Chaque participant-e reçoit au départ une carte très détaillée. Ces cartes sont dessinées par des cartographes spécialement pour la CO et mentionnent tous les reliefs, densité de végétation, pierres, dépressions, collines, clôtures, etc. Figurent également les points de contrôle (postes) numérotés qui doivent être passés dans l’ordre. Le but est de choisir, à l’aide de la carte et de la boussole, le meilleur itinéraire pour rejoindre chaque poste aussi rapidement que possible. Le parcours n’est pas balisé et le chemin le plus rapide n’est pas forcément la ligne droite. Chaque participant-e est muni-e d’une puce électronique qui lui permet de valider les postes.
PS: Quels sont les autres sports que vous pratiquez ?
LB: Après quinze ans de basket à Pully, j’ai découvert la course à pied à l’université, il y a 25 ans. Aujourd’hui, je cours 5 fois par semaine, pour 1500 km par année. Je participe à des marathons, des trails et des courses populaires telles que Sierre-Zinal ou Morat-Fribourg. Ajoutez à ça un peu de VTT et de vélo de route et beaucoup de ski de fond en hiver avec 17 participations au marathon de l’Engadine.
PS: Comment êtes-vous arrivé à la CO ?
LB: Grâce à une rencontre au sein de l’entreprise pour laquelle je travaille. Je cours souvent à midi avec des collègues et j’ai été invité à participer à une CO. J’aime les cartes et la géographie, ce qui ne m’a pas empêché de me perdre 3 ou 4 fois durant ma première course. Mais j’ai adoré. J’aime particulièrement l’aspect ludique de ce sport.
Laurent Bischoff en pleine préparation d’un parcours.
PS: Participez-vous à des courses à l’étranger, au niveau International ?
LB: Ayant vécu aux États-Unis, j’ai participé à des courses d’orientation dans la région de San Francisco où j’étais vu comme « le Suisse » avec notre réputation internationale en CO. On me demandait des conseils sur les cartes ; il faut dire que les leurs n’ont pas le niveau de détail des cartes suisses ! J’ai également participé à la Swiss O Week, une semaine de CO organisée tous les deux ans en Suisse qui attire des orienteurs du monde entier. La prochaine aura lieu aux Portes du Soleil en 2026.
PS: Auriez-vous une anecdote ou un souvenir marquant à nous raconter ?
LB: Lors d’une course, on peut être amené à suivre le concurrent qui nous précède. Ou à être suivi. Il m’est arrivé une fois d’être suivi sur 5 ou 6 postes et j’en avais marre. J’ai fait diversion en indiquant aux suiveurs une fausse direction, dans un talus bien raide.
PS: Le 17 novembre 2024, votre club, le CARE-VEVEY ORIENTATION, organisera sa 100e course d’orientation populaire. Est-ce que cette course est ouverte à tout le monde ou faut-il être membre d’un club ou licencié ?
LB: La course est ouverte à tous et toutes. On peut arriver le matin, s’inscrire et participer, même s’il est préférable, pour des raisons d’organisation, de s’inscrire en ligne.
PS: Cette course proposera une distance de 15 km avec 100 postes à valider. En quoi un tel parcours est-il exceptionnel ?
LB: Il y aura différents parcours, dès 4,4 km. Les plus téméraires choisirons les 15 km, ce qui est très long. Généralement, les CO ont 10 ou 20 postes et font 3 à 10 km. Après une montée en funiculaire, la course débutera dans les bois du Mont-Pèlerin, traversera le vignoble de Lavaux et se terminera en milieu urbain à Vevey. Cela nécessite une grosse organisation, plusieurs cartes distribuées au long du parcours, des puces permettant l’enregistrement de 100 postes qui peuvent d’ailleurs être louées sur place.
PS: La distance de course, par exemple 15 km, est une distance idéale. Est-ce qu’il arrive que des concurrent-e-s se perdent ou fassent de grands détours ?
LB: En général, la distance est donnée à vol d’oiseau. On peut rajouter 30 % à 50 % en fonction du cheminement effectif choisi par les participants-es. Il arrive que des gens se perdent, mais ils finissent toujours par gagner l’arrivée. Tout le monde est contrôlé à la fin de la course et, je vous rassure, on n’oublie personne.
PS: Est-ce que ce type de course peut se pratiquer en famille, avec des enfants ?
LB: Vous pouvez faire cette CO en famille, sur les parcours les plus faciles. Tout le matériel peut se louer sur place. J’ai commencé à faire des CO avec mon fils quand il avait 4 ans. Dix ans plus tard, c’est moi qui ai de la peine à le suivre.
PS: Quelles sont vos ambitions sur cette course?
LB: Je vais essayer de faire les 15 km. Je précise que je n’ai pas vu le parcours. La difficulté va être d’éviter d’oublier un poste sur les 100 à valider. Cela demande beaucoup de concentration. Encore une fois, la CO c’est la tête et les jambes !
Texte : Gilles Scherlé
Photos : CARE-VEVEY ORIENTATION
Informations et inscriptions sur le site: https://www.care-vevey-orientation.ch/100eme/accueil